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  • Christine Mégret

Tout train doit traverser le tunnel .


Léo, 4 ans , se rend compte qu’il a laissé son livre préféré chez ses grand parents qui habitent à 30 minutes de la maison. Le livre est important, c’est celui qui ouvre la porte au sommeil lorsque ses parents le lui ont lu : son petit rituel, son moment câlin, c’est comme ça il en a besoin.

Agathe, 6 ans, est attablée pour savourer son goûter après une bonne journée d’école. Elle se réjouit de pouvoir enfin décompresser en savourant sa pâtisserie préférée: celle au chocolat avec de la crème au milieu que réussit si bien le pâtissier du coin de la rue. Or, par un geste maladroit, elle vient de la faire tomber à même le sol .

Louise, 11 ans, appliquée et bonne élève, ouvre son cartable et réalise qu’elle a oublié son cahier d’allemand dont elle a besoin pour réviser un contrôle le lendemain.

Léo, Agathe, Louise, réagissent avec un mouvement de panique lorsqu’il réalisent le problème : Léo imagine qu’il ne pourra pas s’endormir, Agathe déplore de ne pouvoir se régaler, Louise se demande comment elle pourra réviser, les trois se mettent à pleurer à chaudes larmes.

30 minutes pour retourner chez les grand parents, c’est pas la mer à boire ! Pour le gâteau, il suffit de traverser la rue et de payer 3 francs, Pour les devoirs , quoi de plus simple d’appeler quelqu’un pour demander d’envoyer le texte à apprendre.

Ces 3 enfants n’ont pas grand chose à se reprocher, une distraction seulement et cela nous arrive à tous non ? alors pourquoi ne pas aider quand c’est si facile ?

Quel parent bien intentionné ne va pas tout mettre en œuvre pour sécher les larmes de leurs adorables bambins ?



Revenons à la métaphore du tunnel : on peut considérer que les émotions douloureuses sont les tunnels , et nous , nous sommes les trains qui les traversons. Et nous devons traverser le tunnel afin de voir la lumière de l’autre côté, c’est ainsi que nous grandissons, c’est ainsi que nous nous renforçons c’est ainsi que nous devenons résilients .

Le problème du parent bien intentionné est donc qu’il stoppe le mouvement du train vers la sortie. On peut être tenté par exemple de consoler l’enfant ou même d'effacer le problème en allant à la boulangerie ou chez les grand parents...

Trop souvent lorsque nos enfants sont aux prises avec des émotions difficiles telles la colère, la tristesse, la peur , la culpabilité, la solitude….nous essayons de les persuader que ces émotions ne sont pas justifiées, de les consoler, de stopper ce sentiment désagréable. On leur explique peut être que leur réaction est exagérée et que tout va bien se terminer.

A première vue, nous voulons les aider mais si nous réfléchissons de plus prêt, c’est nos propres sentiments que nous essayons de soulager car il nous est tellement désagréable de voir nos enfants souffrir.

C’est nous qui souhaitons arrêter leurs pleurs, pas eux.

Si on reprend l’analogie, on ne veut pas que le train s’arrête dans le tunnel, il faut l’accompagner afin qu’il voit la sortie.

Nous aussi, en tant qu’adultes nous pouvons être tentés d’éviter le parcours vers la sortie qui nous paraît long. Nos stratégie : manger une glace, boire un bon verre de vin, faire une activité compulsive (achats en ligne), regarder une série , se mettre sur nos réseaux préférés tout pour oublier que l’on se trouve dans le tunnel.

Pourtant cette attitude ne fait que nous duper, juste oublier pour un moment qu’on se trouve dans le tunnel de l ‘émotion. Pourtant si nous acceptons l’émotion et la vivons en pleine conscience, nous nous sentirons beaucoup mieux . C'est ce qui est pratiqué dans toutes les thérapies de l'acceptation : en luttant contre une émotion on ne fait que la renforcer, au lieu de cela ces thérapies nous proposent de vivre pleinement l'émotion, de la ressentir dans son corps.

On ne peut pas enseigner à nos enfants qu’il y a une sortie secrète alors que ca n’existe pas : il faut traverser l’émotion et la vivre.

Laisser nos enfants vivre les émotions qu’ils doivent vivre c’est un peu ce que le célèbre psychologue du développement Gordon Neufeld (spécialiste de la théorie de l’attachement) décrit dans son livre « Hold on to your kids ».

« …. Un parent doit faire danser l’enfant sur ses larmes, sur le lâcher prise et sur le sentiment de repos qui vient après avoir vécu l’émotion…le parent doit accompagner l’expérience de frustration de l’enfant. L’objectif ne doit pas être de donner une leçon mais de transformer la frustration en tristesse…. Bien plus important que nos paroles est le sentiment de l’enfant que nous sommes avec lui et non contre lui …. »


C'est dans ce sens que je travaille avec les jeunes qui fréquentent le Centre de l'Ecoute Tomatis : lorsqu'ils me confient une souffrance, je n'essaie pas de la minimiser. Je les écoute, leur demande de la décrire, de lui donner une forme, une couleur, une température, un poids, une odeur, de la ressentir dans leur corps. Lorsqu'ils ont bien identifié cette difficulté, ils peuvent alors réfléchir à des solutions et ils me surprennent toujours par leur capacité à trouver ce qui est juste dans leur cas précis.


Le travail du parent est donc :

· se tenir à côté de l’enfant qui vit l’émotion difficile,

· le laisser pleurer et exprimer son émotion

· faire preuve d’empathie dans son vécu

· permettre que la leçon de vie soit apprise et non sermonée

· l ‘aider par le questionnement à trouver une solution.

Ainsi le travail du parent n’est pas de faire en sorte que l’enfant cesse de pleurer le plus vite possible, mais de lui apprendre la résilience et la responsabilité.

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